La reine soleil

Egypte antique, 18ème dynastie.
Akhesa, ravissante princesse de 14 ans, est loin d’imaginer qu’elle règnera un jour sur l’Egypte…
Lorsque son aventure commence, l’impétueuse jeune fille se rebelle contre son père, le pharaon Akhenaton. Elle refuse de vivre confinée dans l’enceinte du palais royal et veut découvrir pourquoi sa mère, la reine Nefertiti, est partie s’exiler sur l’île d’Eléphantine. Akhesa s’enfuit avec l’aide du prince Thout, dans l’espoir de retrouver sa mère. Au mépris du danger, les deux adolescents voyagent alors des rives du Nil aux dunes brûlantes du désert, et affrontent avec courage le mercenaire Zannanza et les prêtres qui complotent pour renverser le pharaon.
Avec leur innocence comme seule arme, Akhesa et Thout surmonteront de nombreuses épreuves, et connaîtront ensemble un destin extraordinaire.

 

Entretien avec Didier Lockwood:

Comment avez-vous découvert le projet de LA REINE SOLEIL ?

Didier Lockwood : Philippe Leclerc m’en avait parlé pendant que nous travaillions sur Les enfants de la pluie. Je connais Philippe depuis longtemps et nous avons une sensibilité artistique très proche. Nous nous étions si bien entendus que nous avons convenu de prolonger cette expérience sur un second film.

Quelles ont été les premières indications de Philippe Leclerc ?

Didier Lockwood : Il m’a conseillé de laisser de côté les deux premières bobines, qui sont constituées de scènes d’action courtes et complexes, et de commencer directement par la troisième, là où il voulait faire apparaître les grands thèmes musicaux du film. Les séquences que l’on voit à partir de ce moment-là sont plus longues, et chargées d’émotions.

Avez-vous composé alors des thèmes musicaux pour les personnages principaux, ou en fonction de chaque scène ?

Didier Lockwood : J’ai d’abord créé des thèmes pour illustrer des paysages, notamment pour la scène où l’on voit le général envoyer un faucon surveiller le soldat qui va à la rencontre du groupe de mercenaires. Là, j’ai utilisé une musique arabisante, avec un violon qui joue de manière modale. J’ai composé ensuite le thème du pharaon, qui exprime le côté mystique intime du personnage et non pas son statut de maître de l’Egypte. J’ai utilisé des références à la musique française, à Ravel, Fauré et Debussy. Je cherchais à exprimer quelque chose d’assez sensible et dépouillé, qui exprime la fragilité d’Akhenaton.

Pourrait-on dire que vous avez choisi d’exprimer le ressenti des personnages et non pas d’illustrer directement ce l’on voit à l’image ?

Didier Lockwood : Ça a été le choix de Philippe, effectivement. Je trouve que c’est une démarche originale, qui se démarque de la musique clinquante et souvent standardisée que l’on entend dans les films d’animation américains. Je voulais participer à ce projet avec mon identité de compositeur européen.

Pourriez-vous décrire les thèmes qui accompagnent Akhesa et Thout ?

Didier Lockwood : Le thème d’Akesa apparaît pour la première fois lorsqu’elle traverse le palais accompagnée de sa chatte. C’est un thème ethno-contemporain, avec un groove à mi-chemin entre l’orientalisme et le rythm and blues ! En ce qui concerne Thout, c’est un thème burlesque, qui illustre la légèreté, l’insouciance. Philippe me disait que ce thème lui rappelait les leitmotiv ironiques d’Ennio Morricone que Sergio Leone utilisait tout au long d’un film. J’utilise de multiples variations autour du thème de Thout, même pendant les grandes scènes de poursuites.

Comment avez-vous créé le thème de l’entrée d’Akhenaton dans la pyramide ?

Didier Lockwood : Je souhaitais souligner le côté mystique de ce voyage. Toute la musique du film a été finalisée sur synthétiseur, mais avec des samples de vrais instruments – violons, trompettes, flûtes, hautbois, etc – complétés ensuite par des enregistrements de parties solo avec de vrais musiciens pour le hautbois, le cor anglais et les flûtes ethniques. J’ai joué la partition de violon. Dans la séquence de la pyramide dont nous parlons, j’emploie aussi de vrais chœurs. C’est une très longue progression, très solennelle, qui se conclut en crescendo par les chœurs.

Comment avez-vous eu l’idée de travailler avec Shirel ?

Didier Lockwood : Je connaissais déjà Shirel et j’appréciais sa merveilleuse voix. Elle a fait preuve d’une musicalité et d’un professionnalisme exceptionnels en studio. Chacune de ses prises était parfaite !

Avez-vous créé aussi des bruitages qui sont presque des éléments de la musique ?

Didier Lockwood : Oui. Je tenais à le faire, car je considère que cet aspect créatif qui se rapproche de la musique concrète fait aussi partie du travail du compositeur. J’ai travaillé sur des sons extrêmement élaborés, qui ajoutent un spectre narratif à la musique. J’ai utilisé cette technique sur la séquence de la pyramide, et aussi pendant que le prêtre poursuit Akhesa à la fin du film. Au départ, il n’y avait que des effets sonores basiques – le grognement d’un crocodile, les galops des chevaux, des coups de tonnerre- et sur les indications de Philippe, j’ai créé des sons de synthèse à partir de recherches et de mélanges. J’ai également mis au point une réverbération harmonique très intéressante à partir d’un son de synthétiseur basique. Couplé avec des instruments comme des harpes ou des cordes, on obtient un spectre et une spatialisation assez incroyables . Cela donne une ambiance fantastique très intéressante, qui ressort d’autant plus que Philippe et moi avons réalisé un mixage en 5.1 pour le film.

Comment vous sont venues les idées des différents thèmes musicaux ?

Didier Lockwood : En improvisant ! Le grand thème du désert m’est venu d’un trait. Je me suis lancé en jouant la mélodie et les harmonies en temps réel, et cette musique est restée. Je ne suis pas quelqu’un qui travaille étape par étape, qui analyse, décortique, besogne pour arriver à ses fins. Il faut que l’inspiration vienne vite, qu’elle jaillisse. Soit c’est fulgurant, soit ça ne va pas ! Le thème du pharaon a été créé de la même manière, en partant d’une esquisse spontanée, que j’ai retravaillé ensuite en profondeur. Généralement les premiers jets sont les meilleurs, les plus purs. Ensuite, on essaie de refaire en améliorant, et on tue souvent ainsi la fulgurance originelle. Ce que j’aime bien dans une composition, c’est une certaine fragilité. Une faille qui touche et qui émeut.

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