BO: Lune froide

Co-écrit avec Jackie Berroyer, Lune froide est une des premières productions de Luc Besson. Patrick Bouchitey décide de reprendre ses deux personnages toujours interprétés par le réalisateur lui-même et Jean-François Stévenin, que nous retrouvons quelques années après l’aventure nécrophile du court métrage.

Conscient du poids narratif du passif de ces anti-héros, Bouchitey ne révèlera qu’à la fin du film sous forme de flashback l’épisode qu’il évoque pourtant tout au long de son récit. Loin de meubler ou d’offrir une « version allongée » de son court métrage, il se base sur une autre nouvelle de Bukowski : Trouble with the Battery.

Cette suite d’évènements crus, sublimement photographiés en noir et blanc, jettent un éclairage amer sur le quotidien de Simon et Dédé. L’un essayera tant bien que mal de s’en sortir, alors que l’autre oubliera petit à petit ses rêves de gloire. Leur vie ne sera alors qu’errances, recherche de bonheur (que l’origine du traumatisme de Simon ne fera que cristalliser).

C’est avec fascination et tendresse que nous suivons le parcours de ces deux grands enfants (la séquence du parc d’attraction est en ce sens révélatrice), nous offrant leur vision du monde, que ce soit sur la religion, les femmes, les mendiants, la musique.

Le son a d’ailleurs une importance capitale dans le film. Toujours présent ou évoqué (la guitare, la cassette, la carrière fantasmée de Dédé, etc), sa présence n’est pas anodine, et permet d’accentuer l’idée que nos deux personnages ne sont que des adolescents.

D’ailleurs, le mixage du film surligne et privilégie certains sons plutôt que d’autres. Le spectateur va ainsi entendre les notes que joue Dédé en grattant une guitare imaginaire.

Autre point allant dans ce sens, Dédé va à un moment doubler un extrait d’un film devant son poste de télévision. Ce passage résume à lui tout seul l’enjeu du réalisateur, qui est de nous faire découvrir le monde vu par ces deux inadaptés sociaux, ce que sa sublime mise en scène ne cessera de révéler.

Lorsque le film sort en 1991, il divise encore une fois le public et la presse, notamment Télérama qui publie deux critiques de Lune froide.

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