Pédagogie

L’expérience musicale de Didier Lockwood l’a conduit à porter un regard particulier et soucieux sur l’enseignement du violon.

De sa jeunesse, il garde des souvenirs douloureux de ses premiers cours particuliers : “ils tenaient plus du supplice de l’écartèlement, que de l’initiation instrumentale !”; du conservatoire, une vision trop théorique et rigide. Cette éducation ne lui a appris qu’à reproduire une technique virtuose au détriment de toute créativité personnelle.

Par la suite, il ne s’est plus contenté d’interpréter une partition, mais s’est ouvert à l’improvisation élargissant ainsi sa vision de la musique. Cette liberté nouvelle lui a permis d’aller à la rencontre d’autres cultures musicales telle que le jazz, le blues, le folk, la soul, les musiques du monde…

Didier Lockwood ne renie en aucun cas la nécessité d’acquérir la solide technique qu’apporte l’enseignement classique. Cependant, il considère que le musicien d’aujourd’hui doit savoir aborder tous les styles musicaux. Les concepts rythmiques, harmoniques et d’improvisations doivent impérativement faire partie du cursus éducatif, lui permettant ainsi de devenir un artiste accompli.

Dans ce sens, il publie son ouvrage pédagogique Cordes et âmes (prix SACEM 2002) et crée en 2001 le CMDL (Centre des Musiques Didier Lockwood), reconnu par le Ministère de la Culture. Cette incontournable école de musique propose un enseignement unique en Europe ; elle offre aux musiciens professionnels de tous bords d’apprendre et de se perfectionner dans la pratique certes complexe, mais infiniment gratifiante, de l’improvisation musicale qui est l’antithèse même du “n’importe quoi”.

Didier Lockwood est devenu l’un des ambassadeurs de ce mode d’expression qui lui tient tant à cœur. Il s’implique personnellement avec passion dans l’enseignement de cette discipline, et retrouve chaque semaine avec un réel bonheur ses étudiants au CMDL.

 

L’ENSEIGNEMENT  DU  VIOLON  JAZZ

 

“Je n’ai jamais tant appris qu’en enseignant aux autres. C’est en faisant travailler mes élèves que j’ai mis en place une pédagogie spécifique aux besoins du violon jazz. Ainsi, la méthode Cordes et âme développe ce nouveau concept d’apprentissage.

 

 

Quelques axes de l’enseignement

  1. La tablature. Privé de repère visuel, le violoniste se doit de créer des schémas de positions de doigts.
    Il développe ainsi la connaissance du manche et définit une topographie de l’instrument.
  2. La technique d’archet. La flexibilité des doigts de la main droite permet de répondre à l’exigence rythmique du jazz. Le poussé – tiré constant de l’archet permet la bonne interprétation et conduite du swing. Chaque note jouée sur le temps doit être précédée d’un poussé en note muette (comme une prise de respiration). Cette méthode garantie une bien meilleure mise en place.
  3. Le coup d’archet du swing. Il faut assimiler ce coup d’archet à celui du “drive” (chabada de cymbale du batteur). Les phrasés doivent s’appliquer sur ce mouvement. Comme le batteur a deux baguettes pour jouer le contre-poids rythmique, le violoniste doit, comme le guitariste, se servir de l’aller et retour de la main droite. Chaque doigt de la main gauche jouant les notes, doit se soulever et imprimer le rythme en coordination avec l’archet. Pour rester au contact de la pulsation, il faut jouer court à l’archet (la meilleure longueur restant celle du pliage et dépliage des doigts de la main droite).
  4. La bonne dynamique du swing dépend de la place de l’attaque de chaque note et de sa longueur.
    “La botte secrète”. Le secret de l’articulation de mon jeu vient uniquement du travail des doigts de la main droite. La main ne serre pas l’archet, elle le soulève afin d’obtenir une bonne qualité de son (jazz). Les accentuations sont données par la pression de l’index sur la baguette en dessous de la deuxième phalange. Le mouvement qui suit est la base de l’articulation. Il peut être joué de longues minutes à un tempo très rapide sans fatigue, ni crispation si l’on utilise cette technique (pliage et dépliage des doigts).
  5. Le rythme. Le rythme se pose sur le diaphragme et notre technique d’émission du son peut être assimilée à celle du trompettiste. Le violon qui se tient en haut du corps, fait remonter l’énergie rythmique. Il est indispensable de la faire redescendre vers son centre de gravité physique situé au dessus du bassin. C’est là que la danse intérieure doit prendre siège. Un bon jazzman est en premier lieu apprécié pour son placement rythmique. Toute la construction harmonique et mélodique de l’improvisation doit reposer sur ce placement et jamais le contraire sauf pour les formes d’improvisation non pulsatives (Free jazz).
  6. La respiration. L’archet est la colonne d’air et l’articulation du violoniste. Il faut avoir la conception virtuelle de la respiration de l’archet, et apprendre à respirer en rythme.

 

 

Conclusion: Jouer du jazz au violon est très difficile, mais avec rigueur et méthode et surtout avec humilité et patience, tout est possible. J’espère que ces petits conseils de base vous donneront l’envie d’en savoir plus! Bon courage…”

 

Didier Lockwood

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